Archive de la catégorie ‘Route 2008’

Femme pour L’aimer [27] – fin.

Mercredi 22 octobre 2008

Ainsi, nous achevons cette route estivale par cette dernière méditation.

Dans l’agitation quotidienne de la ville, les cours, le travail… gardons nous des moments de calme, laissons volontairement « le temps filer », continuons notre moment lumière quotidien.

Et toujours, puisons en Lui. Car nous pouvons tout en Celui qui nous fortifie.

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Regarde la nature.

D’un enfant, elle fait un homme ; et d’un gland, elle fait un chêne. Mais combien d’heures doivent s’ajouter aux heures, combien de jours aux jours, pour que l’enfant devienne homme et pour que le gland devienne chêne !
Car il faut du temps pour tout : pour la croissance et pour l’avancement. Laisse donc à chaque chose le temps de devenir ; à chaque créature le temps de mûrir.

Ne t’énerve pas de cette lenteur. Ne te décourage pas d’être si peu avancé sur le chemin de la vie ; si peu solide encore. Ne t’irrite pas contre ton prochain qui n’est pas encore ce qu’il devrait être. Ne critique pas l’inachevé. Ne te révolte pas contre la vie qui ne t’a pas encore donné ce que tu attends d’elle !

Tout est si lent à venir ! Et c’est bien qu’il en soit ainsi. La patience, la confiance, la persévérance sont de bonnes travailleuses, garde-les à ton service.

La hâte et l’impatience ne sont jamais arrivées à rien de grand ; et la beauté n’est pas l’œuvre d’une minute.
Attends, et laisse le temps passer …

Album de la route

Vendredi 17 octobre 2008

Chères GA,

Voici enfin les photos de notre route à Rocamadour !

Elles sont disponibles dans la catégorie « album photo ».

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Et pour celles qui n’étaient pas avec nous ces quelques jours, nous espérons que cela leur donne envie de participer à la procahine.

Rendez-vous donc en juillet 2009 !

Femme pour L’aimer [26]

Jeudi 16 octobre 2008

Moment lumière. 

Prends le temps de penser,
Prends le temps de prier
Prends le temps de vivre
Voici la source de la force
Voici la plus grande force sur terre
C’est la musique de l’âme.

Prends le temps de jouer
Prends le temps d‘aimer et d’être aimé
Prends le temps de donner
Voici le secret de perpétuelle jeunesse
Voici le privilège donné par Dieu
Ce jour est trop court pour être égoïste.

Prends le temps de lire
Prends le temps d’être amical
Prends le temps de travailler
Voici la fontaine de sagesse
Voici la route vers le bonheur
Voici le prix du succès

Prends le temps de faire la charité,
C’est la clef du ciel.

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Femme pour L’aimer [25]

Vendredi 10 octobre 2008

Moment lumière. 

 

Pourquoi ces temps d’arrêt sur nos routes quotidiennes, pressantes, encombrées, harcelées?

Parce que, en route, halte souvent s’impose: pour s’asseoir sur la borne ou le tronc, reprendre forces et souffle, s’accorder eau fraîche, nourriture, arrimer son sac, ôter le caillou du soulier.

Contempler l’arbre, cueillir la fleur, goûter le fruit, observer l’animal sauvage ou familier, épier, envier l’oiseau rapide.

Réconforter le compagnon, rencontrer le passant, saluer l’habitant, bavarder avec l’enfant.

Juger du relief, vérifier l’orientation, évaluer les distances prévoir étape et gîte du soir.

Entendre l’appel, toujours neuf, de la route.

Ecouter le vent, embrasser l’horizon, lever les yeux vert la montagne, admirer le ciel, s’agrandir de tt l’univers.

Saluer la Madone, adorer le Crucifié, se recueillir en dieu, se réjouir en Dieu, se fortifier en Dieu …

Et reprendre la route plus lucide, plus fort, plus ardent.

Père Edmond Barbotin.

 

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Femme pour L’aimer [24]

Mardi 7 octobre 2008

Chiara Badano
29 octobre 1971 – 7 octobre 1990

L’histoire de Chiara Badano est simple et extraordinaire à la fois.

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Sa naissance le 29 octobre 1971 à Sassano (Italie du Nord-Ouest) comble de joie ses parents qui, depuis onze années espéraient un tel événement. Bien que la famille ne dispose que de modestes revenus, le papa est camionneur, la maman quitte son poste d’ouvrière dans une entreprise de pâtisserie pour « suivre sa fille ». Chiara, enfant joyeuse et vive, sait se réjouir des petites choses et se montrer généreuse. Dans un devoir d’école, elle demande à Jésus pour Noël non pas des jouets mais « la santé pour mamie Gilda et toutes les personnes qui ne vont pas bien ». A neuf ans, elle fait une rencontre fondamentale pour le reste de sa vie avec « l’idéal de l’unité », lors d’un rassemblement d’enfants du Mouvement des Focolari. Son enthousiasme est tel qu’elle va entraîner ses parents à participer au Familyfest en 1981, un festival mondial de familles organisé par les Focolari. Ce sera le début de leur conversion…

En parcourant les cahiers d’école de Chiara, on note son émerveillement devant la vie. Adolescente, elle aime retrouver ses copains et copines dans un café les soirs de week-end. Elle adore chanter et danser, ne supporte pas de rester immobile et aimerait bien être hôtesse. Très sportive, elle pratique la natation, le tennis et les balades en montagne. C’est précisément lors d’un match de tennis qu’elle éprouve une douleur subite et lancinante à l’épaule. Les médecins, qui au début avaient diagnostiqué un simple cal osseux, doivent se rendre à l’évidence. Il s’agit en fait d’une forme de cancer des os parmi les plus graves et les plus douloureuses. Chiara accueille la nouvelle avec courage. Après un long silence, sans pleurs ni rébellion, elle dit : « Je suis jeune, je m’en sortirai ! ». Pour elle, commence en fait une rapide ascension vers la sainteté.

Examens médicaux, opérations chirurgicales, chimiothérapie. Rien n’y fait et le mal galope, atteignant la moelle épinière. Ses jambes sont désormais paralysées. Les soins s’avèrent très douloureux. Chiara refuse cependant la morphine parce cela lui enlèverait toute lucidité. Elle se dit convaincue que la souffrance embrassée rend libre. Sa force, elle la puise dans sa foi, dans sa découverte  à travers la spiritualité des Focolari  de Jésus, de « Jésus abandonné » qui a pris sur lui toutes les souffrances lors de son cri d’abandon sur la croix. « L’important, c’est de faire la volonté de Dieu. J’avais des projets personnels, mais Dieu avait les siens pour me garder avec lui. Jésus m’a envoyé cette maladie au moment juste. Vous ne pouvez imaginer quelle est ma relation avec Jésus maintenant ! Il me semble qu’il m’appelle à quelque chose de plus, de plus grand… raconte Chiara à ses amis. Peut-être vais-je rester sur un lit pendant des années. Je n’en sais rien. Pour moi, il n’y a que la volonté de Dieu qui importe : la faire bien, vivre l’instant présent, entrer dans le ‘jeu’ de Dieu […] Un autre monde m’attend et je n’ai qu’à m’abandonner. Je sens que je fais partie d’un projet splendide qu’on me dévoile peu à peu. » Ces paroles fortes accompagnent son témoignage de vie.

Chiara offre tout ce qu’elle vit pour les jeunes, pour son diocèse, pour ceux qui sont loin de la foi, pour les missions, pour les Focolari. Le jour de ses 18 ans, elle reçoit une importante somme d’argent… qu’elle s’empresse de donner à un ami qui travaille en Afrique auprès d’enfants pauvres et malades. Sa chambre, d’abord à l’hôpital, puis à la maison, devient lieu de rencontres, d’apostolat et d’unité. C’est son « église ». Les médecins sont touchés par son attitude. L’un d’eux, Antonio Delogu, commente : « »Son sourire et ses grands yeux lumineux nous prouvaient que la mort n’existe pas, il n’y a que la vie. » La chimiothérapie lui fait perdre ses cheveux auxquels elle tenait tant. A chaque mèche qui se détache, elle prononce un simple et intense « Pour toi, Jésus ».

Un dialogue lumineux de foi et d’amour surnaturel s’établit avec sa maman qui passe d’interminables journées auprès d’elle. « Maman, est-ce juste de mourir à 18 ans ? « ,  » Je ne sais pas si c’est juste. Mais si Dieu a ce dessein sur toi, nous devons faire sa volonté » ; « Maman, cela me plairait tellement de faire de la bicyclette, et Dieu m’a pris mes jambes. », « Jésus t’a pris tes jambes, mais il t’a donné des ailes ! », « Tu as raison. Si on me demandait si je voulais me promener, je dirai non parce que, telle que je suis, je suis plus proche de Jésus »…

Chiara Lubich, la fondatrice des Focolari, la suit au long de sa maladie et entretient avec elle une correspondance vitale (voir encadré). « Je lui dois tout » affirme l’adolescente, au point de lui demander un « nom nouveau » pour marquer son adhésion particulière à l’idéal de l’unité. Ce sera : Chiara Luce (Claire Lumière) telle une lumière qui illumine tant de personnes.

Nombre de personnes viennent lui rendre visite. « Si au début, nous venions la voir pour la soutenir, bien vite nous avons compris qu’elle nous attirait comme un aimant » commente un jeune. Tous ceux qui viennent la voir expérimentent près d’elle une « atmosphère de paradis ». Assis sur un tabouret au pied du lit de Chiara, l’évêque du diocèse (Aqui) Mgr Martino, est frappé par la profondeur spirituelle de Chiara : « Son apprentissage de la sainteté est soutenu par son idéal de vie, par sa générosité, par sa disponibilité à l’amour si caractéristique des adolescents […] Je sentais aussi en elle la présence de l’Esprit Saint qui la rendait capable de transmettre à ceux qui l’approchaient sa façon d’aimer Dieu et tous les hommes. » Emu, le cardinal Saldarini lui demande un jour : « Tu as des yeux merveilleux, une lumière merveilleuse. D’où te vient-elle ? ». Et Chiara Luce de répondre simplement : « Je m’efforce d’aimer beaucoup Jésus. »

« Si tu le veux, toi, Jésus, moi aussi je le veux » ne cesse de répéter Chiara Luce alors que le mal progresse inexorablement et que la souffrance la tenaille. « Je me sens si petite et le chemin à parcourir est si ardu ! Mais c’est l’Epoux qui vient à ma rencontre…  » reprend-elle, rappelant en cela ce qu’a vécu la « petite » Thérèse de Lisieux. Jésus abandonné est tellement son Epoux que Chiara Luce désire se préparer particulièrement à sa rencontre. Elle choisit une robe blanche avec une petite ceinture rose et la fait essayer à une amie pour voir l’effet produit. Ce sera sa robe pour « les noces », ses funérailles. C’est elle qui choisit les fleurs, les chants, les lectures et donne pour consigne à sa mère : « Quand tu me prépareras sur mon lit de mort, maman, tu ne devras pas pleurer, mais répéter ‘Maintenant Chiara Luce voit Jésus’. » Ainsi, le dimanche 7 octobre 1990, le jour de Notre-Dame du Rosaire, à quatre heures du matin, elle adresse ses dernières paroles à sa mère : « Sois heureuse car je le suis ! » Son dernier don sera celui de ses yeux qui, greffés, permettront à deux garçons de retrouver la vue.

2000 personnes, au moins, de tous âges et de tous milieux sociaux, croyants ou non, assistent à ses obsèques. Il y règne une atmosphère de joie simple. Mgr Martino qualifie dans son homélie Chiara Luce de « fruit de la famille chrétienne, d’une communauté de chrétiens, d’un mouvement qui vit l’amour réciproque et rayonne de la présence de Jésus ». Tout ne s’arrête pas là. Bien au contraire. Des personnes qui apprennent l’histoire de Chiara Luce se sentent poussées à vivre plus radicalement l’Evangile, à mettre Dieu à la première place dans leur vie. Sa tombe est même devenue un lieu de pèlerinage accueillant fleurs, offrandes pour « ses » petits amis d’Afrique, lettres et demandes de grâces. Sa sainteté est devenue contagieuse… A tel point que, le 7 décembre 1998, la Congrégation pour la cause des saints a fait savoir à l’évêque du diocèse d’Aqui qu’aucun obstacle ne s’opposait à l’enquête diocésaine en vue de la béatification de la « servante de Dieu », Chiara Badano. Dans quelques mois, son dossier sera soumis au Vatican. « Soyez une génération de saints ! » répète toujours Chiara Lubich aux jeunes Focolari. Chiara Luce, par sa vie, ses vertus prouvées, sa charité sans limite et sa confiance totale en Dieu, est un reflet de l’unique sainteté, celle de Dieu. Ainsi, est-il tout à fait possible d’être sainte à 18 ans !

Femme pour L’aimer [23]

Vendredi 3 octobre 2008

Claire de Castelbajac (1953-1975).

Le privilège de Claire fut de comprendre et de nous faire comprendre que la confiance totale engendre la joie des enfants de Dieu et que notre vocation au bonheur peut et doit se réaliser en partie sur cette terre.

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«  Jésus… dites bien à Notre Père que je l’adore et que je propagerai sa Gloire autant que je le pourrai. Dites à Notre Mère que j’essaie d’avoir sa pureté et sa gentillesse. Dites au Saint-Esprit qu’il faut qu’il m’aide à vous aimer encore plus. Merci et à demain. »
Notes dans un cahier à l’âge de 13 ans

« J’ai du bonheur en trop, ça déborde. Voulez-vous que je vous le donne ? Je suis contente, contente, toute remplie d’un bonheur (la joie des enfants de Dieu, peut-être ?) d’un bonheur qui ne peut pas se définir. »

Née le 26 octobre 1953 dans une famille profondément chrétienne, Claire reçoit dès son plus jeune âge une éducation religieuse solide, qui l’enracine dans une foi vivante. Sa nature généreuse et passionnée se trouve ainsi orientée vers Dieu, même s’il y a des jours de découragement : « Je ne veux plus être sainte, c’est trop difficile ! » Dès son enfance, la Croix du Christ la marque de son empreinte par le biais de la maladie : à quatre ans, une toxicose aiguë, dont elle ressentit longtemps les séquelles tenaces et fâcheuses, faillit l’emporter ; puis ce fut une succession de maux : infection intestinale, congestion pulmonaire, diphtérie, etc. Mais ces ennuis de santé n’entament pas sa bonne humeur. Dès qu’elle est en âge de le comprendre, sa mère lui propose d’offrir ses souffrances à Jésus, de les supporter en pensant à Lui. Claire, pour qui offrir signifie donner, proteste aussitôt : « Je ne veux pas le lui offrir, je ne veux pas qu’il ait mal au ventre à ma place ! ». Mais quelques années après – elle a dix ans – elle confie, un jour de forte fièvre, qu’elle a « demandé dans sa prière d’être malade pour la conversion des pécheurs »

Claire gardera brûlant au fond de son cœur ce désir de sainteté confié, alors qu’elle a six ans, à sa mère – et dont elle lui parlera souvent – et annoncé un jour à son père en ces termes :
« - Vous savez ce que je veux être plus tard ?
- Oui, je le devine. Tu veux être religieuse.
- Non, c’est plus fort que ça.
- Alors je ne devine pas…

- Je veux être sainte, voilà ! C’est plus fort que d’être religieuse, hein ? »

Ainsi, alors qu’elle est pensionnaire à Toulouse, elle note dans son carnet intime : « Je voudrais bien savoir ce que je ferai quand je serai grande. Être mère de famille. J’aimerais tant avoir des enfants pour moi toute seule : mes enfants [...] Être missionnaire en Afrique, comme Albert Schweitzer. Que c’est beau de donner sa vie pour le bon Dieu ! Mais quitter sa maison, sa patrie, ses parents, c’est un dur sacrifice, mais si les missionnaires l’ont fait, pourquoi pas moi ? ‘S’ils ont été saints, pourquoi pas moi ?’, disait saint Augustin. Et que j’aimerais mourir comme Jésus sur la Croix, mourir par le martyre, c’est beau, et avec l’aide de l’Esprit-Saint, n’y arriverais-je pas ? Et Jésus mort sur la Croix, couronné d’épines, flagellé, insulté, profané [...], Lui mon Dieu, en qui je crois, j’espère et j’ai confiance, n’a-t-il pas souffert horriblement pour nos péchés ? Et au lieu d’aller porter la Bonne Nouvelle à ses pauvres afin qu’ils souffrent moins, nous restons dans un bon fauteuil, au coin du feu, tranquillement [...] ! C’est inadmissible, alors que tant de peuples nous attendent pour connaître le Christ ! »

Il ne faudrait pas croire que la ferveur de Claire lui fut toujours facile et naturelle ; mais ayant développé une grande force de volonté, elle fait des efforts même quand cela lui coûte beaucoup, comme en témoigne cette lettre à une amie : « L’autre jour, une cousine déclare (heureusement sans témoin) qu’elle m’admire beaucoup et cherche en tout à me copier. Non seulement je n’en ai été aucunement flattée, mais je l’ai franchement engueulée d’avoir si mauvais goût et je lui ai dit que si elle ne rétractait pas ses paroles, je me sentirais obligée d’être quelqu’un de bien devant elle. Elle ne s’est pas rétractée, hélas !… mais j’ajoute que je ne l’ai pas revue depuis trois semaines. [...] Sans rigoler, tu te rends compte de la responsabilité qu’on a ! [...] Alors je choisis d’être hippie. Ça m’a toujours tentée, dès l’apparition du mot, par son orthographe bizarre et sa sonorité séduisante. Imagine : libre de toutes entraves. [...] Donc avec cette vie de rêve, on n’aurait aucun exemple à donner, et il paraît en plus, qu’entre hippies il n’y a aucune haine particulière, parce que personne n’a à se préoccuper du voisin, et qu’il y a du soleil pour tout le monde. Ah ! Pouvoir vivre sans s’interdire certaines choses sous prétexte que ça choque des gens ! En d’autres temps j’aurais déchiré cette lettre idiote, mais en toute franchise, je te l’envoie. As-tu prié pour ta pauvre Clarita qui perd la boule ? »

Après ses études secondaires et une année universitaire à Toulouse, Claire qui a alors dix-huit ans et demi, part pour Rome où elle a réussi le concours d’entrée de l’Institut de Restauration. La ville éternelle où elle fait l’expérience de la liberté et de l’indépendance lui offre de nombreuses tentations, particulièrement sur le plan de la pureté. Elle sollicite auprès de sa famille force prières, et elle-même répète inlassablement cette invocation qu’elle aime tant : « Ô Marie Immaculée, je vous confie la pureté de mon cœur. Soyez-en la gardienne pour toujours ».

Si jusque là les variations sur le thème du bonheur se succédaient pour former une symphonie inaltérable : « Je suis heureuse plus que tout au monde ! », « Je suis contente, contente, contente ! », « Je suis très heureuse ! J’ai du bonheur en trop, ça déborde. Voulez-vous que je vous en donne ? », « Je suis en pleine plénitude de bonheur ! », les difficultés romaines vont permettre à Claire de vraiment prendre conscience de la source de tout bonheur : l’union à Dieu. « Je me dis qu’au milieu de cette boue païenne, il faut que je fleurisse par Dieu, donc vivre Dieu, donc la joie de Dieu. [...] Je dois être gaie sous peine de manquer de témoignage. [...] Je ne vis plus comme je le devrais, je suis pleine de résolutions que j’oublie tout le temps. Et ma première est celle-ci : être joyeuse (sans forcer) quoi qu’on fasse : vachement dur ! [...] Il me faut d’urgence du calme et une retraite. » « Il faut absolument que je témoigne de Dieu dans la joie… Suffit pas de belles phrases. »

Prise au piège d’une vie artificielle et brillante, Claire ne perçoit pas tout de suite qu’elle suit une mauvaise voie. La réflexion d’une de ses amies : « Tu verras ma pauvre fille, tu y viendras à notre athéisme. Je ne te donne pas un an pour que tu sois comme nous », ajouté à un sentiment de mécontentement d’elle-même et à un demi-échec dans ses études, lui sert de tremplin pour repartir dans la voie sur laquelle Dieu l’attend. Cette épreuve dans sa foi, qui fut pour elle une purification, consolide sa vocation missionnaire auprès des personnes qu’elle fréquente. Vocation au bonheur. « Je voudrais donner du bonheur à tous ceux que j’approche et semer la joie. La petite Thérèse attendait d’être au ciel pour faire des heureux. Moi, je veux en faire sur la terre ».

Une véritable grâce, un pèlerinage en Terre Sainte qui lui permet de mettre ses pas dans ceux du Christ, vient parachever ce retournement, cette conversion, en lui faisant découvrir l’essentiel : « [...] un pèlerinage harassant et bouleversant au sens propre du terme. Ma vie a complètement changé d’optique en trois semaines : au-delà de ma familiarité avec la Sainte Vierge, je découvre l’Amour de Dieu, immense, étonnant et simple. [...] La charité chrétienne c’est d’aimer les autres parce que Dieu les aime. Voilà, entre autres, ce qui me bouleverse de joie divine. [...] J’espère que je ne parle pas trop en bonne sœur, mais je me sens pleine de joie divine ».

A son retour de Terre Sainte, elle reçoit son ordre de mission : participer à Assise, à la restauration des fresques de la basilique de Saint-François. Claire est chargée de la restauration de la fresque représentant sa sainte patronne, puis de celle de saint Martin, dite du Miracle de l’Hostie.

Ce temps passé à Assise est comme enveloppé de recueillement. Elle a décidé de loger chez les Bénédictines, profitant ainsi de leurs offices et de l’eucharistie quotidienne, car elle a désormais soif de paix et de silence. Aussi ce « séjour monastique » lui offre-t-il ce havre de paix tant désiré pour prier et lire (elle « dévore » les œuvres de Charles de Foucauld). Son travail lui aussi l’oriente vers le Seigneur, les fresques étant « pleines de vie spirituelle qui ne peut pas ne pas nous toucher ».

Toute tournée vers le Seigneur qui l’a ramenée auprès de Lui, Claire d’un naturel gai, pleine d’humour et de joie de vivre, revient dans la résidence familiale de Lauret transfigurée ; sa joie ne l’a pas quittée, elle s’est approfondie. Claire connaît désormais la joie parfaite dont nous parle saint Jean : « Demeurez en mon amour, [...] afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 15, 9 ; 11). Les épreuves de tous ordres que Claire a subies – la maladie depuis l’enfance, son épreuve spirituelle à Rome et les conséquences sur ses études – ont participé à cette purification qui la préparait à accueillir la mort et à entrer dans l’union divine. « Je suis tellement heureuse que si je mourais maintenant, je crois que j’irais au ciel tout droit, puisque le ciel c’est la louange de Dieu, et j’y suis déjà », confie Claire à sa mère quelques jours avant que ne se déclenche la méningo-encéphalite virale foudroyante qui doit l’emporter. Ces mêmes jours sont marqués par un pèlerinage à Lourdes, dans ce lieu marial qu’elle aime tant. Là, un mystérieux colloque entre elle et la Sainte Vierge se produit, tandis que Claire prie, prosternée devant la grotte. Leur échange silencieux est leur secret… Mais la mère de Claire voit à son visage qu’il s’est passé quelque chose et en conçoit une grande inquiétude. Sans doute a-t-elle compris, inconsciemment, que Claire possède en plénitude cette joie de Dieu tant recherchée, et que la place d’une telle âme n’est plus sur la terre.

Alors que Claire magnifiait la création par son travail artistique, le Créateur finissait de façonner le cœur de sa créature pour le grand face à face. L’ouvrage achevé, Il peut venir chercher, le 22 janvier 1975, celle qui désirait n’être qu’ « une louange vivante à Dieu », pour qu’enfin unie au chœur des Bienheureux, elle soit, à leur instar, une louange incessante.
Flèche embrasée d’absolu, Claire traversa le monde pour nous délivrer, par sa vie extérieurement si semblable à la nôtre, ce message : « Tu as pour vocation le bonheur ! »

Femmes pour L’aimer [22]

Jeudi 2 octobre 2008

Jour 5:

Claire de Castelbajac, Chiara Badano : Témoins de notre vocation au bonheur

« Soyez toujours joyeux dans le Seigneur, je le répète, soyez joyeux ». (St. Paul)


Chante… montre ta joie de vivre … quand t’es à bout de force, lorsque tu n’en vois plus la fin … si un jour il t’arrive de ne plus savoir ou tu en es, si tu n’arrives plus à te relever …  chante… et tu surmonteras tes difficultés…

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Il y a la joie qui vient de dedans et il y a celle qui vient du dehors.
Je voudrais que les deux soient tiennes
Qu’elles remplissent les heures de ton jour
Et les jours de ta vie ;


Car lorsque les deux se rencontrent et s’unissent,
Il y a un tel chant d’allégresse que ni le chant de l’alouette ni celui du rossignol ne peuvent s’y comparer.
Mais si une seule devait t’appartenir ;

Si pour toi je devais choisir
Je choisirai la joie qui vient du dedans.

J’ai besoin de quelque chose qui dure
De quelque chose qui n’a pas de fin, qui ne peut pas finir
Et la joie qui vient du dedans ne peut pas finir

Elle est comme la rivière tranquille
Toujours la même, toujours présente

Parce que la joie qui vient du dehors est comme le soleil qui se lève le matin et qui, le soir se couche.
Comme l’arc en ciel qui parait et disparaît
Comme la chaleur de l’été qui vient et se retire
Comme le vent qui souffle et passe
Comme le feu qui brûle puis s’éteint…
Trop éphémère, trop fugitive.

Elle est comme le rocher
Comme le ciel et la terre qui ne peuvent ni changer, ni passer,

Je la retrouve aux heures de silence
Aux heures d’abandon


Son chant m’arrive au travers de ma tristesse et de ma fatigue
Elle ne m’a jamais quittée

C’est Dieu ; c’est le chant de Dieu en moi


Cette force tranquille qui dirige les mondes et qui conduit les hommes et qui n’a pas de fin
Qui ne peut pas finir.

Livre du Lézard.

Femmes pour l’Aimer [21]

Mardi 30 septembre 2008

 Moment lumière:

Le courage se trouve dans l’acceptation et l’action….

Le courage c’est se lever quand tout semble perdu d’avance, affronter la journée où il fait sombre. C’est être capable de passer à autre chose, ne plus s’accrocher à l’impossible.

Le courage c’est avoir la foi que je peux m’en sortir malgré tous les obstacles, c’est garder l’espoir quand survient même un sentiment d’abandon, c’est prier et prendre le temps d’aller chercher des ressources.

Le courage c’est de faire face à la vie, de persister à croire que ça va passer et que ça va aller mieux, voir la vie comme un défi et chercher des moyens pour un mieux être.

Le courage c’est ESSAYER…

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Femmes pour L’aimer [20]

Samedi 27 septembre 2008

Sainte Monique, mère de Saint Augustin (332-388)

A l’heure où sont trop oubliés les devoirs de la jeune fille, de l’épouse et de la mère chrétienne, il est utile de rappeler les vertus de cette admirable femme. Ce que nous en savons nous vient de la meilleure des sources, son fils Augustin.

monique.jpgMonique naquit à Tagaste, en Afrique, l’an 332. Grâce aux soins de parents chrétiens, elle eut une enfance pure et pieuse, sous la surveillance sévère d’une vieille et dévouée servante.

Encore toute petite, elle aimait aller à l’église pour y prier, elle cherchait la solitude et le recueillement ; parfois elle se levait même la nuit et récitait des prières. Son cœur s’ouvrait à l’amour des pauvres et des malades, elle les visitait, les soignait et leur portait les restes de la table de famille ; elle lavait les pieds aux pauvres et aux voyageurs. Toute sa personne reflétait la modestie, la douceur et la paix. A toutes ces grâces et à toutes ces vertus, on aurait pu prévoir que Dieu la réservait à de grandes choses.

Dieu, qui a ses vues mystérieuses, permit cependant qu’elle fût donnée en mariage, à l’âge de vingt-deux ans, à un jeune homme de noble famille, mais païen, violent, brutal et libertin, presque deux fois plus âgé qu’elle, et dont elle eut beaucoup à souffrir, ainsi que de sa belle-mère.

Dans cette situation difficile, Monique fut un modèle de patience et de douceur ; sans se plaindre jamais, elle versait en secret les larmes amères où se trempait sa vertu. C’est par ces beaux exemples qu’elle conquit le cœur de Patrice, son époux, et lui obtint une mort chrétienne, c’est ainsi qu’elle mérita aussi de devenir la mère du grand saint Augustin.

Monique, restée veuve, prit un nouvel essor vers Dieu. Vingt ans elle pria sur les débordements d’Augustin, sans perdre courage et espoir. Un évêque d’Afrique, témoin de sa douleur, lui avait dit : « Courage, il est impossible que le fils de tant de larmes périsse ! » Dieu, en effet, la récompensa même au-delà de ses désirs, en faisant d’Augustin, par un miracle de grâce, l’une des plus grandes lumières de l’Église et l’un de ses plus grands Saints.

Monique, après avoir suivi Augustin en Italie, tomba malade à Ostie, au moment de s’embarquer pour l’Afrique, et mourut à l’âge de cinquante-six ans. Augustin pleura longtemps cette mère de son corps et de son âme. Le corps de sainte Monique a été transporté à Rome dans l’église de Saint-Augustin, en 1430. Cette femme illustre a été choisie comme patronne des mères chrétiennes.

Femmes pour L’aimer [19]

Jeudi 25 septembre 2008

Pauline Jaricot ( 1799-1862)

Pauline Marie Jaricot, une femme étonnante qui vivait à Lyon au siècle dernier. Dans cette ville où elle vécut, l’industrialisation va donner naissance à un prolétariat qui vit misérablement, de salaires dérisoires.

paulinemariejaricot.jpgPauline Marie Jaricot, née le 22 juillet 1799, est baptisée dans la maison de ses parents par un prêtre réfractaire. Elle a vécu une époque orageuse, en effet elle aura le temps de voir, le Consulat, l’Empire, la Restauration, Charles X, Louis-Philippe, la seconde République et le second Empire.

Ses parents tiennent commerce comme plieurs et vendeurs de soie, profession florissante. Antoine Jaricot et sa femme Jeanne Latier forment un couple uni, clairvoyant, qui mène bien ses affaires.

Pauline connut près d’eux une enfance heureuse et choyée avec ses cinq frères et sœurs prenant des habitudes de luxe et de richesse. Sa mère l’appelait « son alouette du Paradis » car elle avait une voix admirable, une imagination vive et un caractère violent. Elle ne savait pas garder un juste milieu. Sa coquetterie grandit avec elle, bien qu’elle soit myope et maladroite. Mais la colère et l’orgueil vont la tyranniser toute sa vie. Elle était si vivante de sa propre vie. Très pieuse cependant, elle se tourne quotidiennement vers Notre Dame avec une dévotion toute particulière pour Jésus présent dans l’Eucharistie.

Dans son quartier, elle côtoie le meilleur et le pire, élégance et misère se succèdent. Elle traverse souvent des quartiers pauvres mais ses préoccupations sont ailleurs. Elle sait qu’elle plaît et elle participe volontiers aux réceptions bourgeoises. On envisage de la fiancer ; après la mort de sa mère, Pauline reprend sa vie mondaine mais une cassure s’est opérée dans son cœur. Elle trouve sa jeunesse triste et monotone, sa vie ennuyeuse.

Tout change un dimanche de Carême. Pauline n’a pas encore 17 ans, à la suite d’un sermon sur les illusions de la vanité, elle décide de tourner radicalement la page de son passé devant sa famille réunie. Elle fit refaire un récent portrait trop avantageux pour elle. Elle choisit délibérément de s’habiller comme les pauvres au point que sa femme de ménage refuse de sortir avec elle.

Voulant être l’allumette qui allume le feu, Pauline recrute parmi les ouvrières de son quartier, des filles de son âge, partageant son idéal et sa piété. Elle les appelle les Réparatrices du Cœur de Jésus méconnu et méprisé, elle veut aider avec elles ceux qui souffrent. Les pauvres accourent devant sa maison, car elle donne tout, linge, argent, restes de cuisine, au point que son père, alarmé, lui défend de donner le linge de maison sans sa permission. Elle se sent portée vers l’amour des pauvres, elle est enthousiasmée d’aider au renouveau missionnaire.

Nous sommes en 1818, Pauline a 19 ans. Avec ses compagnes réparatrices, elle quête déjà. En effet, avec son bataillon sacré, comme elle dit, elle institue, dans l’usine de son frère, le sou hebdomadaire, soit un franc actuel, ramassé de la main à la main auprès des ouvrières généreuses et convaincues, en faveur de la propagation de la foi. Elle fait appel au plus grand nombre, non pas seulement pour faire de grandes rivières avec de petits ruisseaux, mais pour pouvoir associer à une grande œuvre les petits et les humbles. Dès le départ, elle structure son œuvre en imaginant d’associer 10, 100, 1000 personnes en faveur des missions. Le clergé commence à redouter le tort possible pour les œuvres locales. Pauline est consternée mais elle persévère. Son frère, prêtre des missions étrangères l’encourage à continuer cette œuvre que Dieu a commencé par ses mains, tel un grain de sénevé qui couvrira bientôt toute la surface de la terre.
Le 3 mai 1822, dix messieurs reprennent l’association pour porter la lumière de la foi dans les deux mondes, Amérique et Asie. Pauline reste dans l’ombre. Elle laisse le soin de développer ce qu’elle a inventé. Elle se contente de bien tenir sa centaine.

Son confesseur lui ordonne de se retirer de la vie active. Elle obéit. Pleine de vitalité et d’espoir, de santé et d’esprit d’entreprise, être obligée à l’inaction, sans en comprendre le bien fondé, est pour elle une croix difficile à porter. Cela lui permet cependant de comprendre mieux la force et la nécessité de la prière.

Elle s’occupe de son père et de la maison familiale, elle participe à la chorale de la paroisse à contre cœur, car « ces dames refusent le concours des filles pauvres ». Elle veut faire entrer les pauvres dans une vie de prière, seul antidote à l’athéisme de son milieux bourgeois. Elle va leur apprendre à sa façon le mot solidarité.

En 1826, Pauline a 27 ans, elle va mettre en place le Rosaire Vivant, en adoptant un moyen analogue à celui qui avait fait le succès de la propagation de la foi. Elle associe 15 personnes priant chaque jour un des mystères en union de prière quotidienne avec tous les autres. Les 15 membres du groupe prennent part au même travail spirituel en faveur d’une même intention. Pauline anime les groupes par des circulaires qui deviennent pour les réunions ce qu’étaient les lettres de St Paul pour les premiers chrétiens. Elle élargit la prière des associés aux dimensions de l’Eglise universelle. Elle demande à chacun de s’adjoindre 5 autres qui à leur tour en amèneront 5 autres, ce qui provoque un formidable essor du Rosaire Vivant, tout en favorisant partout une constance dans le bien et un parfum de vertu qui n’existait pas auparavant. Le Rosaire Vivant se développe partout à l’étranger, Suisse, Belgique, Angleterre, plusieurs contrées d’Amérique, Canada, Colombie, Afrique.

En 1832, à 33 ans, Pauline achète, sur la colline de Lorette, une grande maison pour abriter l’association du Rosaire Vivant, et pour offrir à Notre Dame de Fourvière un piédestal de verdure et de prière. Elle groupe à Lorette quelques compagnes filles de Marie pour répondre aux obligations de la nouvelle association, envoie, dès la première année 240 000 livres, 80 000 images, 40 000 médailles et 19 000 chapelets.

Le 27 janvier 1832, un bref de Grégoire XVI, lui apporte l’approbation du souverain Pontife. A peu près tous les évêques de France, recommandent le Rosaire Vivant comme essentiel pour le diocèse. Pauline manifeste beaucoup de savoir faire, d’esprit pratique et de sûreté, de jugement. Elle est grande, vive, au regard direct et bienveillant.

En 1834, en France, le Rosaire Vivant compte plus d’un million d’adhérents. Au moment du décès de Pauline, ils seront 2 millions 250 000. Elle tombe gravement malade. Trompant la vigilance de ses médecins, elle se rend à Rome chez les religieuses du Sacré Cœur. Le pape Grégoire XVI lui rend visite, la trouvant en agonie, il se recommande à ses prières dès qu’elle sera arrivée au ciel. En retour, Pauline lui fait promettre de glorifier Sainte Philomène en cas de guérison. Le pape, croyant ne pas avoir à s’exécuter, promet tout. Guérie, elle se présentera au Vatican où le pape est stupéfait.

Cette même année 1834, Lyon connaît des émeutes sanglantes, les canuts renouvellent leur insurrection de 1831 car les promesses n’ont pas été tenues. En effet, ils travaillent 16 heures par jour, entassés avec leur famille dans d’étroits logements, ils supportent péniblement les méfaits du machinisme et de l’empire de l’argent qui les exploite. A mesure que l’industrie s’exerce à remplacer les bras de l’homme par les machines, l’ouvrier vertueux qui pouvait faire des économies pour l’avenir ne connaît aujourd’hui que la gêne.

Pauline réfléchit et cherche à faire du regroupement des ouvriers leur propre moyen de salut permettant au père de famille grâce à un travail réglé avec prudence et justement rétribué de voir ses enfants grandir au foyer sans être privés de l’éducation convenable à leur avenir.

En 1836, Pauline sollicite et obtient un acte d’affiliation à l’ordre dominicain pour tous les associés du Rosaire Vivant. Le curé d’Ars envoie à Lorette Mariette Bouy, 25 ans plus jeune que Pauline, la lui confiant pour lui apprendre à aimer d’avantage Jésus et Marie. Elle y retrouve Julia Morin, la future biographe de Pauline. Innombrables sont les visiteurs quotidiens, ceux du quartier, ceux du Rosaire Vivant, le clergé, des fondateurs d’ordre ou d’œuvres, des évêques.

En 1844, Pauline a 45 ans, elle dénonce la cupidité des négociants qui se croient assez forts pour ne pas craindre le mécontentement des ouvriers. Pauline veut rendre à l’ouvrier sa dignité d’homme. Elle veut donner à un premier groupe d’ouvriers les moyens de se régénérer, leur permettant ainsi de devenir à leur tour, apôtres dans leur milieu. C’est le début de l’affaire Rustrel. Un certain Gustave Pair qui se disait maître de forge avait parlé à Pauline des terrains ferrifères près d’Apt dans le Vaucluse, de quoi faire une fonderie. Pauline ne savait pas qu’elle avait affaire à un escroc. Sur erreur d’appréciation du Père Ricard, elle contracte des emprunts et charge Gustave Pair d’acheter l’usine de Rustrel. Hélas au bout de quelques mois, il n’y a plus d’argent en caisse, Pair sera emprisonné et Pauline a bel et bien été escroquée.

Durant tout ce temps, Pauline dirige son Rosaire Vivant avec l’âme en paix, voulant être victime devant Dieu pour son milieu, sa patrie, l’Eglise et le Pape. Elle écrit d’ailleurs au curé d’Ars : »Je suis toujours étendue tout entière sur la croix, je combats avec peine. »

C’est la révolution de 1848, la propriété de Lorette est décrétée parc national. Avec l’aide de Maria Dubouy, elle part plaider à travers la France la cause de ses usines, et l’œuvre des ouvriers. Elle est aidée par beaucoup, elle erre de ville en ville où sa réputation de sainteté est solide. Elle ne perd courage, elle va voir le Pape à Rome. Pie IX, qui l’estime beaucoup, demande au conseil de la propagation de la foi de l’aider, mais ces messieurs restent sourds et enrayent partout ses collectes.

Pauline rédige le 29 janvier 1851 une supplique à la Sainte Vierge pour lui confier tout son spirituel, document retrouvé à sa mort cousu dans son vêtement.

Avec une énergie incroyable, elle veut remettre l’usine de Rustrel en route. Elle fait rallumer les hauts fourneaux, mais la trahison sournoise se poursuit. Pair, sorti de prison, lui intente un procès. Au bout de longues et pénibles péripéties, l’usine sera vendue. Pauline se retrouve totalement ruinée. En faisant trop confiance, elle a tout perdu, mais les dettes restent et dix ans de calvaire. Déconsidérée, sujette aux calomnies, abandonnée par son milieu, elle aménage à travers le clos de Lorette un raccourci pour aller à Fourvière, un escalier à péage pour rembourser ses dettes mais elle se heurte sans arrêt à la commission de Fourvière chargée de la conservation du sanctuaire qui cherche constamment à déprécier Lorette pour l’acquérir à bas prix. Pauline est prête à quitter Lorette dans les 24 heures mais à la condition d’être sûre que tous ses créanciers, les petits et les gros seront dédommagés.

En 1853, Pauline a 54 ans, elle n’arrive plus à acheter de pain, elle se fait inscrire sur le rôle des indigents.

Le 19 mars 1855, elle rédige une supplique à St Joseph pour lui confier toutes ses affaires temporelles. On retrouvera le manuscrit cousu lui aussi dans son vêtement.

En 1856, elle rédige une sorte de testament : « Mon seul trésor est la croix, je répugne beaucoup à la souffrance, mais j’accepte volontiers votre calice, je vous recommande ceux envers qui je pourrai mourir insolvable. »
En la fête du Saint Rosaire 1861, elle écrit : « avant de m’endormir du sommeil de l’espérance, sur le sein de notre tendre mère, il m’est doux de dire que ma plus grande consolation est d’avoir toujours été soumise à l’Eglise, acceptant son enseignement, rejetant sans examen tout ce qu’elle condamne . » Elle fait avancer son lit jusqu’à la fenêtre et regarde longuement sa ville qu’elle aimait tant.

Le 9 janvier 1862 au petit matin, Maria Dubouy constate la paix et la sérénité de son visage, irradié par une lumière qu’elle seule pouvait voir. Elle reçoit ses dernières paroles : « Marie, oh, Marie, je suis toute à vous. »

Ses funérailles furent celles d’une pauvresse indigente, où en plus de sa famille et de ses proches, des amis pauvres et riches ainsi que des prolétaires de la soierie, et des canuts osent lui faire cortège. Son neveu Ernest Jaricot et sa famille auront à cœur d’acquitter toutes ses dettes.

En juin 1881, un bref du pape Léon XIII félicite Julia Morin d’avoir publié ses souvenirs sur Pauline Marie Jaricot, « Pieuse vierge dont la mémoire à plus d’un titre est en bénédiction dans l’Eglise. »
En 1962, à Lyon, un congrès international célèbre le centenaire de la mort de Pauline, fondatrice de la propagation de la foi.

En 1963, sa sainteté Jean XXIII, proclame l’héroïcité de ses vertus.

Au service de sa ville, au service de la mission, par la propagation de la foi au service du monde par le Rosaire Vivant, attentive aux problèmes ouvriers, telle fut Pauline Marie Jaricot qui vécut à Lyon de 1799 à 1862.

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